Campus
Limoud
Bernard Maruani
Une main bionique est-elle une main s’agissant des gestes rituels à effectuer par cette dernière? La main peut-elle être réduite à sa fonction ou faut-il qu’elle soit aussi de chair et d’os ? La question est d’autant plus cruciale que la main intervient sous toutes sortes de modalités dans d’innombrables gestes liturgiques. Elle est à l’épicentre du rituel sacrificiel –« n’envoie pas ta main » dit l’ange à Abraham s’apprêtant à sacrifier son fils sur l’autel. Le Temple de Jérusalem peut ainsi être appréhendé comme la scène institutionnelle et sacrée de son déploiement. La « main puissante » est l’un des attributs de Dieu ; les tables de la Loi portées par « les mains de Moïse » sont écrites « du doigt de Dieu ». La main est au coeur de la problématique du Chabat, puisqu’elle est par excellence l’agent du travail. Le nom main (yad) constitue le nom juif (yehoudi) ; et une lettre de l’alphabet qui en porte le nom (yod) la figure sous la forme du poing. Il faut relever ici que Maïmonique a intitulé Yad HaHazaqa (Main puissante) son grand code légistatif, indice de la conscience aiguë qu’a la tradition rabbinique de la centralité de la main. Pour juger du statut de la main bionique les autorités rabbiniques contemporaines convoquent l’ensemble des sources de la tradition hébraïque. Au fil de notre étude c’est de la définition même de la main, dans le cadre de la tradition hébraïque, dont il sera question, de l’analyse de ses gestes et de leur sens, de ses déclinaisons substitutives –et donc de l’outil- de sa transposition abstraite –le signe. Avec cette question cardinale : quel est le sens de l’omniprésence, dans le cadre de la tradition, de cet attribut divin ?
